Épisode 9
Création de l'Ecole des Mines d'Albi
Dans la foulée de la création de l’école des Mines de Nantes et sur la revendication de ministres, à la fois originaires et élus du Sud ouest, la création d’une nouvelle école est décidée et l’appel à concurrence est lancé.
Bordeaux, Pau, Périgueux, Agen, Albi sont candidates.
Parallèlement le gouvernement nomme une commission présidée par Guy Paillotin[1]. Celle-ci émet deux recommandations :
- adopter le génie des procédés comme dorsale pédagogique,
- retenir Pau comme site d’implantation.
Cette seconde préconisations ne résiste pas aux assauts Midi-Pyrénéens.
Selon mes informations, Roland Dumas, ministre des affaires étrangères et ex député de Dordogne semble tenir la corde et avoir obtenu de François Mitterrand le choix de Périgueux. Pour comprendre le contexte du moment, il faut rappeler qu’on est en pleine guerre du Golfe et que Roland Dumas traite directement du sujet avec le Président de la République, ignorant au passage le Premier Ministre qui se trouve être Michel Rocard, lequel (ce n’est un secret pour personne) ne portait pas ostensiblement le président dans son cœur. Sur les conseils d’un de ses conseillers, Michel Rocard prend l’initiative d’annoncer que c’est Albi-Carmaux qui a été retenu.
Pourquoi ce choix d’Albi-Carmaux annoncé par le premier ministre? Quelques éléments de réflexion : Carmaux est à quelques km d’Albi, c’est à Carmaux que s’illustra Jean Jaurès[2] et c’est à Carmaux que François Mitterrand avait lancé sa campagne présidentielle en 1981…
Finalement le Tarn a gagné Albi-Carmaux est retenu. Le choix du génie des procédés pose par contre quelque problème. Il existe en France deux pôles de compétence en génie chimique, Toulouse et Nancy. Fort heureusement (si l’on peut dire) le génie des procédés correspondait et correspond toujours à la transposition des résultats du génie chimique à toutes les activités qui nécessitent une transformation physique. Le domaine choisi était donc d’actualité, il restait à développer. Cela mit fin aux discussions.
Comme pour Nantes le budget de l’opération fût de 400 millions de Francs cofinancés par la Région, le département, la ville d’Albi, l’État et l’Union européenne.
Le site de construction du site principal de l’école sera Jarlard (quartier situé à l’est de la ville, dans la troisième couronne d’Albi, laquelle correspond à l’urbanisation la plus récente de l’agglomération).
Un institut des techniques et du management sera créé avec plus ou moins de succès à Carmaux dans des locaux libérés par les charbonnages.
L’hébergement des élèves sera quant à lui réalisé pour moitié sur le site de Jarlard et pour moitié en ville par un ensemble neuf boulevard Gambetta et par la réhabilitation de deux ensembles immobiliers, rue de l’Hôtel de Ville et à la Temporalité[3] au pied de la cathédrale au cœur du Viel Albi.
Le concours d’architecture est lancé en 1992, il sera remporté par le cabinet Architecture Studio.
Parallèlement l’école s’installe provisoirement dans une ancienne caserne d’Albi préalablement occupée par un régiment de logistique et de soutien parachutiste. Une première promotion de 18 élèves en formation continue y est recrutée. Une amorce de laboratoires de recherche y est créée. La première promotion en formation initiale est pour sa part recrutée en 1993.
La construction achevée, l’école s’installe définitivement sur le site de Jarlard en 1995, l’école est inaugurée par Christian Pierret alors secrétaire d’État en charge de l’industrie.
Ainsi avec cette dernière école s’achève l’histoire de la création des Écoles des Mines en France. Histoire à multiples rebondissements, mais terriblement passionnante.
Ces écoles ont été avant tout fondées avec de mêmes objectifs : tout d’abord exploiter rationnellement et dans le respect des hommes et de l’environnement les ressources naturelles de la terre puis anticiper les évolutions techniques sociétales et économiques auxquelles nos sociétés allaient être confrontées.
Comme l’immense majorité de mes camarades, je suis fier d’être MINEUR. je remercie ces écoles et leur tutelle de m’avoir permis d’accéder à des études supérieures et de m’avoir donné le privilège de participer modestement à leur développement.
Mes amitiés à tous.
Jean-Claude Duriez
[1]Guy Paillotin est polytechnicien, ingénieur au corps des mines et docteur en sciences physiques de Paris XI-Orsay.
[2] Dans la période 1892-1895 les grèves de Carmaux sont souvent considérées comme l'épisode fondateur de la conversion de Jean Jaurès au socialisme
[3] La temporalité est le lieu ou les évêques d’Albi exerçaient leur activité temporelle.